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« Un sens à la vie. Enquête philosophique sur l’essentiel », de Pascal Chabot, PUF, 262 p., 17 €, numérique 13 €.
Il faut bien admettre que nos vies n’ont aucune importance. Nous aurions pu ne pas être. Nous sommes. « Minuscule événement », écrit Pascal Chabot. « Le sens de ma vie ? Mais quel infime détail en regard de la Grande Ourse, là-bas, et des atomes éternels ! » Pourtant, aussi lucide soit le philosophe, c’est au « futile » et au « vain » de nos préoccupations, telle qu’elles apparaîtraient « du point de vue du cosmos », qu’il consacre son nouveau livre, crânement intitulé Un sens à la vie.
Car le point de vue du cosmos, jusqu’à nouvel ordre, est une chimère, et c’est encore nous qui l’imaginons. Notre vie, elle, n’est pas « là-bas » : elle est là devant, dérisoire mais pleine, passagère mais indépassable. « Je n’ai qu’elle, je ne vois le monde qu’à travers mes yeux, je ne le touche qu’avec mes mains », poursuit Pascal Chabot, qui, en une dizaine de livres, s’est imposé comme un des philosophes les plus déterminés, justement, à rester sur terre, au cœur de ce qu’il y a toujours de mal fagoté, de pas fini, dans l’existence humaine.
Il s’est intéressé au temps, au langage, à la notion floue mais vitale de qualité. Il était naturel qu’il en vienne au problème qui regroupe tout cela : quel sens donnons-nous à ce qui nous arrive et à ce que nous faisons ? Et, parce qu’il est un penseur de l’ouvert, quelqu’un qui pose des questions et assume de ne pouvoir répondre à toutes, le résultat se révèle un modèle de philosophie empirique. C’est-à-dire modeste, parfois tâtonnante, mais toujours stimulante, tant Pascal Chabot, qui écrit dans une langue limpide, vivante, accrocheuse, maîtrise l’art socratique d’amener les doutes les plus communs au plus haut degré possible d’intelligibilité.
La meilleure manière de s’y prendre reste de commencer par le langage courant. Quels sens revêt le mot « sens » ? Le philosophe dénombre trois grands « registres » : la sensation, la signification et l’orientation – ce que nos sens nous révèlent, le sens que nous donnons aux choses, le sens dans lequel nous pensons devoir nous diriger. Or, loin de former un tout cohérent, ces registres s’entrechoquent, ce que nous disent nos sens pouvant, par exemple, sembler démenti par nos connaissances, ou nos projections dans l’avenir bouleverser l’idée que nous nous faisions de nous-mêmes. Au point qu’il faut prendre acte de l’omniprésence du non-sens avant d’espérer en dégager quelque chose qui puisse avoir du sens pour nous, et gouverner nos vies.
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